25 novembre 2015

Fuzz - II (2015)

Cet article aurait pu s'intituler "Fuzz II ou l'équation insoluble du double-album". Considéré comme une espèce de saint Graal par les groupes de la fin des années soixante et surtout des années soixante-dix, le double LP est surtout un défi lancé par ces mêmes groupes à leur créativité : remplir quatre faces de LP d'une musique d'égale qualité. Bigre. Il n'est pas d'ailleurs anodin de constater que bien souvent ces groupes se lancent dans l'entreprise au plus fort de leur renommée.
A ce petit jeu un peu vain, nombreux sont celles et ceux qui s'y sont cassés les dents. On ne refera pas l'histoire, ni même égrener la litanie de ces disques boursoufflés, histoire de ne pas se lancer dans de vains débats avec des fans qui s'en trouveraient heurtés dans leurs convictions les plus profondes.
A tout bien regarder, un double LP entièrement réussi est une incongruité (même les Beatles n'y sont pas parvenus !). Les exemples existent mais se comptent au mieux sur les doigts d'une main (bon on exagère sans doute un peu, on a pas vraiment compté).

Pour autant s'il y avait bien un artiste actuel capable de relever ce défi, à défaut de le gagner, c'était bien Ty Segall. Et il l'a démontré l'an passé avec Manipulator, double album (déjà) remarquable.
Alors qu'en est-il de ce Fuzz II, long de quatre faces donc, de quatorze titres et de presque soixante-dix minutes de musique ?
Et bien, c'est un bon cru ... mais beaucoup trop long.
Il faut dire qu'à l'équation initiale déjà compliqué (concilier durée et qualité), Segall, Moothart et Ubovitch ont ajouté un paramètre qui rend la solution insoluble : le style. Si maintenir l'attention de l'auditeur sur un double LP est une gageure, le faire sur un double LP de heavy psych bien lourd relève de la mission impossible.

Et c'est bien là tout le drame de ce nouvel album de Fuzz.
Depuis que nous en avons fait l'acquisition, nous n'avons jamais pu l'écouter d'une traite. Trop massif.
Pourtant s'il on écoute indépendamment chaque face, ce nouvel album contient son lot de compositions marquantes.
Malheureusement chaque face contient aussi son lot de morceaux moins essentiels, pas de mauvais titres mais qui viennent conforter l'idée que le LP aurait été de meilleure tenue expurgé de ces quelques titres.
On pense à "Pollinate""Burning Wreath" malgré son intro, le plus punk "Red Flag" dans une tentative un peu vaine de rompre toute éventuelle monotonie ou du dyptique "Sleestak" / "Silent Sits the Dust Bowl" qui lassent après plus de quarante minutes d'écoute...

Ce léger agacement qui est le nôtre est à la hauteur de la qualité extraordinaire des autres titres présentés ici.
En effet, Fuzz II reste malgré tout un très bon disque, mieux produit, et d'une qualité égale à son prédécesseur, supérieure même dans ses meilleurs moments.

D'entrée de jeu "Time Collapse pt. II / The 7th Terror" et "Rat Race" prennent aux tripes tandis que "Let Live" plus en retenue et bénéficiant d'un remarquable travail au chant, s'affirme comme un des meilleurs titres jamais écrit par le groupe. Un peu plus loin "Bringer The Light" et surtout "Pipe" payent leur dû à Black Sabbath, de la meilleure manière qui soit. "Say Hello" enchante avec son gimmick entêtant tandis que "Jack The Maggot" enfonce le clou de manière magistrale.

Et puis il y a ce titre final "II", odyssée cosmique à mi chemin entre heavy, rock psyché et krautrock, un titre symptomatique des influences des membres du groupe comme de leurs ambitions élevées.

C'est bien pour cette raison, cette ambition, cette absence de limites, que l'on passera volontiers sur les quelques longueurs de l'album. Dois-t-on vraiment se plaindre qu'un artiste souhaite offrir à ses fans un maximum de titres ? Surtout qu'au cas présent point de mauvais titres ne sont à relever.

Ty Segall et ses amis sont simplement des gens généreux, une denrée rare. Profitons-en.

Frank

Tracklist :
Face A : Time Collapse - The 7th Terror / Rat Race / Let It Live / Pollinate
Face B : Bringer Of Light / Pipe / Say Hello / Burning Breath
Face C : Red Flag / Jack The Maggot / New Flesh / Sleestak
Face D : Silent Sits The Dust Bowl

Audio et Vidéo :





3 commentaires:

  1. Ahah, beau retournement de situation à la fin, bravo !
    Sinon, c'est bien dit et je pense la même chose de ce disque. Très bien mais trop long.

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  2. ('fin cela dit j'ai toujours pas pris le temps de l'écouter bien attentivement, j'attends de recevoir le vinyle !)

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    1. C'est pas une mauvaise chose d'avoir quatre faces, il y a au moins la respiration du changement de face :)

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