28 janvier 2014

Left Lane Cruiser - Rock Them Back To Hell (2013)

Souvenir, souvenir. Quelques heures avant leur concert à Paris (lors du festival "Blues Rules") en juin dernier, Rawpowermag' avait pu interviewer longuement Joe (Freddy J IV - guitariste) et Brenn (batteur) de Left Lane Cruiser. Ils nous avaient laissé entendre que le son serait plus riche en bruits de canettes ainsi qu'en overdubs, qu'ils avaient été accompagnés par Kevin Jackson (oncle de Brenn) à l'harmonica... D'après eux, c'était un disque auquel Left Lane Cruiser serait particulièrement attaché car ils avaient (enfin) eu les moyens d'enregistrer un album sans les limites éprouvées sur les précédents albums.

Une pochette dessinée est une première pour Left Lane Cruiser: une fausse photo de famille zombie [décidément, cette mode...] où sont regroupées 3 générations, une cabane en bois typique des premiers colons (avec son fameux porche) et un système artisanal de distillation (de moonshine?) au sommet de la colline se détachent sur un ciel de lune... En même temps, avec un titre comme "Rock Them Back To Hell" (que n'aurait pas renié AC/DC), on pouvait se douter de la présence de morts-vivants, non? Des costumes de la Guerre de Sécession, une allusion au tableau "American Gothic" de Grant Wood (1930) et un personnage central attaché à défendre sa terre (une ancienne version de la loi "stand your ground" actuelle?) renforcent l'allégeance du groupe à la culture du Middle West. Le groupe a d'ailleurs enregistré sur ses terres, à Fort Wayne, et le mixage s'est fait dans l'Etat voisin du Michigan - sous la vigilance de Jim Diamond (Ghetto Recorders, Détroit) qui avait déjà œuvré sur Junkyard Speed Ball.

L'auditeur est accueilli par "Zombie Blocked" et sa rythmique à base d'objets délaissés puis ramenés à la vie par le duo de Fort Wayne. Assailli, il faut attendre les 2 min 15 pour entendre réellement la guitare et sa réverb' s'exprimer un peu. "Electrify" fait la part belle à l'harmonica, malgré une guitare assez heavy. Le break plus accoustique au milieu du morceau permet de reprendre un peu d'air avant d'être soufflé à nouveau par la guitare et l'harmonica.

Indépendamment des paroles de "Neighborhood", il est facile de voir que l'espace occupé par Left Lane Cruiser a pour voisin celui du clavier de James Leg et des Black Diamond Heavies.

Les paroles de "Juice To Get Loose" renvoient au répertoire partagé par tous les bluesmen [traduction approximative...]: Give me whiskey when I get dry 'Lord / Give me 'shine all the time babe / Get a bowl when I get low/  Give a middle light when I make right... On évoquera (par exemple) l'épitaphe au dos de la pierre tombale de James "Son" Thomas (Leland, Mississippi - USA) tirée du titre "Breakfast Blues": Give me beefsteak when I'm hungry / Whiskey when I'm dry / Pretty women when I'm living / Heaven when I die. Le choix de jouer au bottleneck n'est probablement pas anodin sur ce titre mais Left Lane Cruiser en use sur de nombreux morceaux.

L'ambiance d' "Overtaken" avec sa simili-ligne de basse tranche complètement avec le titre précédent et va rejoindre les influences plus "métal", déjà rencontrées sur l'album Junkyard Speed Ball. "Be So Fine" est plus lent et retourne jouer sur les terres indiennes du drone blues avec le bottleneck.

"Jukebox", titre le plus long (5 min 31) de l'album, devient presque un montage époustouflant et iconoclaste de riffs/solos de la part de Joe. "Coley" tient plus de la balade country-rock que d'un blues, ce qui permet de regarder avec dédain les tenants auto-proclamés du country-rock FM et leurs niaiseries: Rodney Atkins, Jason Aldean, Toby Keith... [Oui, sur Rawpowermag', on sait aussi dire du mal]. Sans harmonica, "Paralyze Ya" permet de remettre la pression et sert de tremplin pour "Righteous" et sa rythmique lourde qui résonnent comme un appel pour la réalisation d'une suite (nécessaire!) à cet album.

En résumé, "Rock Them Back To Hell" n'est pas le climax ni le point faible dans la discographie de Left Lane Cruiser, mais plutôt la fin d'une première "boucle". Quelques titres semblent sortir immédiatement du lot: "Zombie Blocked", "Neighborhood", "Juice to Get Loose"... Le groupe a maintenant derrière lui plusieurs albums, de nombreuses tournées [etc.] et s'est offert de nouvelles possibilités (tant désirées) d'enregistrement. Cette nouvelle sortie chez Alive Records est peut-être une bonne façon de constater le chemin parcouru - même si personnellement on a une tendresse particulière pour les premiers enregistrements ("Gettin' Down" On It et "Bring Yo' To The Table") - et d'attendre avec impatience leur prochaine sortie.

John the Revelator

Tracklist:
Zombie Blocked
Electrify
Neighborhood
Juice to Get Loose
Overtaken
Be So Fine
Jukebox
Coley
Paralyze Ya
Righteous

Vidéos:
 L'intégralité de l'album est écoutable sur Youtube


PS: 2014 étant pleine de bonnes résolutions, c'est promis: on reviendra bientôt sur les Hooten Hallers et Tito Discovery (entre autres).

8 commentaires:

  1. Je suis déçu. Par rapport aux précédents, je trouve que c'est la dégringolade en termes de compo. Ça ronronne mais ça décolle pas. Je suis déjà passé à autre chose, alors que le précédent avait squatté l'autoradio pendant 2 mois. M'enfin bon, je reste quand même à l'affût des dates de tournée pour qu'on se réconcilie.
    Mais quand même, Alive records, c'est moi ou c'est plus ce que c'était ? (rayon nouveautés, j'entends)
    Et sinon, bon boulot, continuez !

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  2. Yep. Pas réussi a rentrer dedans non plus.
    Mais c'est clair que leurs concerts valent le déplacement...

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  3. Merci toto.

    A part quelques titres déjà évoqués, ce nouvel album ne fait pas vraiment le poids face aux plus anciens (même si je l'énonce peut-être de façon édulcorée).

    Quant à Alive Rds, ce label a un héritage énorme grâce au travail de feu G. Shaw, et de sa femme (qui continue). Je crois que la team Rawpowermag' a été surtout déçu par d'autres sorties récentes (John the Conqueror, etc). Comme pour d'autres labels américains (In the Red, etc), on y reste attaché mais on s'intéresse de plus en plus à ce que font de plus d'autres petits labels...

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    1. Pareil, cet album me laisse perplexe.
      Trop d'arrangements sur certaines pistes. Et trop de déjà entendu sur d'autres avec l'énergie en moins. Ca reste bon tout de même. Je préfère toutefois "Bring Yo' Ass To The Table" et "All You can Eat".

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    2. Ca ne répond pas vraiment au sujet, mais il est quand même intéressant de noter une évolution: il y a quelques années LLC était une "découverte", maintenant c'est un groupe nettement plus connu (toutes proportions gardées) dont on arrive à préférer certains disques plutôt que d'autres et qui nous sert de passerelle pour découvrir d'autres groupes...

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  4. Hé John, In The Red ça reste quand même un label intéressant, non ? Sur les deux dernières années ils ont sorti l'album de Fuzz, Slaughterhouse de Ty Segall (+ les rééditions de Reverse Shark Attack et des Traditional Fools), Putrifiers 2 des Oh Sees, le dernier Dirtbombs, un Timmy's Organism (sans même parler de Kid Congo, des Oblivians pour ceux qui aiment, etc)... Je trouve ça plus que respectable !

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  5. Pour ma part ce LLC est clairement l'album le plus faible du groupe. MAIS, on trouve sur ce disque une poignée de titres excellents et surtout même quand c'est moins bien, on a un bon disque malgré tout.
    Sur les sorties Alive Records, le label hormis quelques anciennes signatures qui continuent chez eux, ils ont clairement tourné le dos au punk blues au profit de sonorités plus americana.
    Concernant In The Red oui ça reste un label plus que respectable mais je pense que ce que voulais dire John c'est qu'il regarde peut être moins souvent du côté d'In The Red que vers des plus petits labels (Burger ?).

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  6. Farpaitement, m'suis mal exprimé et le bon Franky m'aura corrigé ;)
    1) On regarde de plus en plus ce que font de petits labels (il n'y a qu'à voir l'origine des commandes groupées sur Planetgong :D)
    2) In the Red Rds a sorti des trucs géniaux (et en plus grand nombre) en comparaison de Alive Rds.

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