24 août 2012

Tav Falco & Panther Burns - Behind The Magnolia Curtain (1981)

Figure légendaire de la scène de Memphis, Tav Falco fait surtout partie des grands oubliés de l'histoire du rock. Pourtant, il est un des derniers grands princes du rockabilly à l'ancienne, tout en ayant contribué à préfigurer le psychobilly naissant. Son influence est indéniable non seulement sur la scène de Memphis mais aussi une décennie plus tard sur des groupes comme les Gories ou le Jon Spencer Blues Explosion.

Pour autant, quand il monte ses Panther's Burn, Falco est tout sauf un perdreau de l'année. Né en 1945, en Arkansas (quoique sa date et son lieu de naissance restent sujet à caution), il rejoint Memphis en 1973 où il gagne sa vie comme poète, réalisateur (il monte même un docu sur RL Burnside en 1974) ou photographe (il a travaillé pour William J. Eggleston). Falco est un artiste, au sens noble du terme, véritable touche à tout de talent.
La légende veut que Falco se fasse remarquer par Alex Chilton lors d'un set où Falco détruit sa guitare avec une tronçonneuse. On ignore si l'anecdote est vraie mais elle marque le point de départ d'une collaboration et d'une amitié entre Falco et l'ancienne icône des Box Tops et de Big Star. C'est avec lui et d'autres pointures que Falco monte son groupe du nom d'un lieu-dit près de Greensville dans le Delta du Mississippi (1) .

Au moment d'enregistrer son premier album, Falco est ainsi entouré d'Alex Chilton et Jim Duckworth (qui jouera ensuite sur Death Party du Gun Club), qui se partagent guitares et fûts, ainsi que de Ron Miller à la basse. On note également la présence sur 4 titres du Tate County Fife & Drum Corps, qui apporte des percussions tribales à l'ensemble.
C'est donc avec ce line-up que Falco enregistre Behind The Magnolia Curtain magnifiquement réédité par Fat Possum cette année en double LP avec Blow Your Top (1982) l'EP qui a suivi.
Ce premier album est enregistré en quelques heures et cela se sent : dense, sauvage, parfois bancal voire hésitant, ce premier album dévoile un groupe aux multiples facettes qui semble refuser tel un leitmotiv toute catégorisation.

Il faut dire que dans ce disque les influences sont diverses et variées : rockabilly bien sûr mais aussi blues malade, early rock and roll ou tango sont quelques uns des ingrédients que l'on retrouve ici.
Et pour cause puisque le disque est composé uniquement de reprises dans des versions que l'on qualifiera de raw and uncut. Désolé pour les non anglophones, on n'a pas trouvé d'équivalent pertinent en français. Mais comment qualifier autrement ces reprises que le groupe joue parfois au ralenti, déconstruit même, le tout joué sur le fil du rasoir par un groupe qui donne l'impression d'être toujours sur la corde raide ? Avec un Falco qui tel un équilibriste mène la danse pour un résultat souvent brillant bien qu'assez exigent.

Bon, il faut bien reconnaître aussi qu'il faut le coeur bien accroché pour écouter ce « Brazil » manifestement alcoolisé mais la relecture de titres plus ou moins obscurs de Ray Harrs, Allen Page, Johnny Burnette, R.L. Burnside ou Leadbelly vaut carrément le détour et place Tav Falco à côté des Cramps qui dans le même temps gravent Psychedelic Jungle.
Cramps, Tav Falco, deux faces d'une même pièce.

Le reste de la discographie de Falco est fait de hauts et de bas même si les EP Sugar Ditch revisited (1985), Shake Rag (1987) et The World we Knew, ce dernier produit une nouvelle fois par Chilton, constituent de solides références. Un Tav Falco qui encore aujourd'hui s'avère être un remarquable entertainer comme nous l'attestions dernièrement à la Java (2).

Frank

(1) la légende veut qu'une panthère, accusée de dévorer du bétail, ait été brûlée vive à cet endroit et que l'on aurait entendu ces cris des lieues à la ronde.
(2) un magnifique moment parfaitement résumé par Rick: http://rawpowermagazine.blogspot.com/2012/05/tav-falco-la-java-24052012.html

Tracklisting :
1 - Come On Little Mama [original de Ray Harris]
2 - She's the One That's Got It [original de Allen Page]
3 - Hey - High School Baby [original de Benny Joy]
4 - Brazil [original de A. Barroso / S.K. Russell]
5 - You're Undecided [original de Johnny Burnette]
6 - Ooooee Baby [original de Jerry Ree]
7 - River of Love [original de Mack Self]
8 - Snake Drive [original de R.L. Burnside]
9 - Blind Man [original de Muddy Waters]
10 - Where the Rio de Rosa Flows [original de Jimmy Logsdon]
11 - Snatch It Back [original de Jr. Wells]
12 - Bourgeois Blues [original de Leadbelly]
13 - St. Louis Blues [original de W.C. Handy Orchestra]
14 - Moving On Down the Line [original de Roy Orbison]

Vidéos :




5 commentaires:

  1. Bancal ou hésitant, ça ne me dérange pas, mais le son ultra cracra fini tout de même par fatiguer (même lorsqu'on n'est pas fan de Pink Floyd!)...
    Jimmy

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  2. C'est vrai que le son n'est pas tip-top mais tu l'as écouté en mp3 ou en vinyle ? Parce qu'en vinyle c'est le jour et la nuit. Comme tout ce qui est peu produit le mp3 fait ressortir tous les défauts ... En vinyle ça passe tranquille, même si c'est pas Pink Floyd :)

    Frank

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  3. t'as oublié prof de tango ! c'est surtout avec ses cours de danse qu'il
    gagnait sa vie, poèsie, photos et vidéos lui rapportaient à peu près rien

    on peut aussi rappeler son role de passeur dans l'histoire de la zique à
    Memphis (et donc dans le monde ;°p et sur New Rose) - d'une part, il a
    largement contribué à déterrer des gens comme Jessie Mae Hemphill,
    Charley Feathers ou Junior Kimbrough, d'autre part, pas sur qu'il y
    aurait eu Oblivians, Reigning Sound ou Reatards sans ses coups de pied
    salutaires au creux de la vague... le disque de ce passage :
    http://rateyourmusic.com/release/comp/various_artists_f2/swamp_surfing_in_memphis/

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    1. ah vi, c'est dickinson qui le découvre avec sa première attaque de scène à la tronçonneuse pendant "Bourgeois Blues" à la pause d'un concert de mud boys and the neutrons dans mes vagues souvenirs, la rencontre avec
      chilton est racontée là :
      http://www.limbos.org/tavfalco/tavfalcoff_mojo2003.htm

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  4. Je crois que je possède ce disque depuis sa sortie, en 80 ou 81 sur Rough Trade en Angleterre ; je l'écoute encore et ne m'en lasse pas. Sur l'EP suivant, réédité dans le même package, on peut entendre une version habitée de "Berta Lou", ce qui reste pour moi l'un des sommets de Gustavo.

    Pour le reste de sa discographie, je conseille vivement le formidable "Pantherphobia" paru en 2000 sur In the Red.

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