6 mai 2011

Californian Cowpunk (1/2)

On le dira jamais assez mais Los Angeles et la Californie en général était le lieu où être au milieu des années 80's. La richesse musicale de cette région à cette époque est assez ahurissante. En sus des groupes évoqués dans le topic consacré au Paisley Underground, rappelons que L.A. était le point de chute depuis 1981 des Cramps et ville d'origine du Gun Club ce qui a amené un surcroît d'un intérêt dans la cité des anges pour le rockabilly et punkabilly.
Si on ajoute à cela une scène punk (X) mais aussi post-punk et New Wave (Wall Of Voodoo) très vivace, l'émergence à San Francisco de la fameuse scène hardcore de la bay area de San Francisco (Black Flag, Dead Kennedys...) vous comprennez mieux le postulat de départ.

C'est dans ce cadre qu'émerge à Los Angeles et ses alentours, une scène que l'on a qualifié de cowpunk. Sous ce vocable quelque peu douteux on retrouve toute une palanquée de groupes qui à l'image du punkabilly, qui remet au goût du jour le rockab' en lui insufflant l'énergie du punk rock, décide d'appliquer le même traitement à des sonorités plus roots, folk et country en tête.
Ce terme de cowpunk désigne à la fois la scène californienne ET un style musical ce qui ne facilite pas toute forme d'inventaire...
C'est pourquoi certains groupes de la même époque ont été rattaché au mouvement en raison de certaines similitudes comme les Jason And The Scorchers originaires de Nashville...

Ainsi ce courant musical est un style à part entière qui essaime dans tous les États Unis dépassant le cadre de Los Angeles et qui surtout restera très vivace aux États Unis. Supersuckers, Legendary Shack Shakers, Reverend Horton Heat, tous ces groupes doivent beaucoup au cowpunk.

Dans ce mélange country/punk, les groupes vont se distinguer finalement par l'apport plus ou moins prégnant du punk rock. C'est pourquoi dans son volet le moins punk on a pu raccrocher les Long Ryders ou les Green On Red au cowpunk, ce qui en soit n'est pas une incongruïté : bien qu'initialement des groupes du Paisley Underground, ces deux groupes partagent le même fonds musical que les groupes de la scène cowpunk. Néanmoins on n'a pas connaissance de quelconques ponts entre ces groupes et ceux du cowpunk.

Cette longue introduction était nécessaire pour expliquer la démarche : ici il ne sera question que de la scène californienne qui en gros a eu ses heures de gloire entre 1984 et 1986.


1ère PARTIE : LES INCONTOURNABLES


THE BEAT FARMERS :

Bien qu'originaire de San Diego, le groupe est essentiel dans la constitution du son cowpunk. Formé en 1983 à l'initiative de Country Dick Montana (batteur et chanteur) et de Jerry Raney (chanteur et guitariste), les Beat Farmers commenceront par écumer les salles à Los Angeles avant de sortir un album impérissable, l'indispensable Tales Of The New West, produit par Steve Berlin (saxophoniste chez les Blasters et Los Lobos).
Ce disque composé de 12 originaux et deux reprises ("Reason To Believe" de Springsteen et "There She Goes Again" du Velvet Underground) conserve tout son attrait aujourd'hui et sonne comme un véritable classique. Haut en couleurs, imprégné d'influence country, le rock des Beat Farmers est tout ce qu'il y a de rafraîchissant et devrait plaire aux amateurs des Long Ryders.








Une vidéo hallucinante de Country Dick Montana enchaînant "California Kids" et ... "Anarchy In The UK"...

L'album est en écoute sur deezer :
http://www.deezer.com/fr/#music/the-beat-farmers/tales-of-the-new-west-89048

Le groupe sortira en 1985 durant une tournée en Angleterre un EP, Glad'N'Greasy, produit par Graham Parker tout de même et qui contient notamment une reprise pas piqué des vers de "Beat Generation" de Richard Hell.
Une réédition de Tales Of The New West (difficilement trouvable) comprend en sus les morceaux de Glad'N'Greasy.
Le groupe sortira régulièrement des disques toujours intéressant jusqu'en 1995 et le décès de Country Dick Montana. Néanmoins ces disques sont moins viscéraux que leur premier effort.

A noter que Country Dick Montana avait également monter un projet live avec Mojo Nixon et Dave Alvin (The Blasters) mais pas de trace "audio" à notre connaissance.


THE BLASTERS :

Les Blasters étaient à n'en pas douter une des figures les plus emblématique du mouvement cowpunk. Composé des frères Alvin, Phil (chant/guitare) et Dave (guitare), du bassiste John Bazz et du batteur Bill Bateman, les Blasters sont l'un des très bons groupes américains des années 80's et sans doute l'un des plus injustement oublié.
Le groupe se forme en 1979 à Downey au sud est de Los Angeles et très vite se taille une solide réputation de groupe de scène. Leurs shows leur attirent même les grâces de la scène punk rock local leur permettant d'ouvrir pour X ou Black Flag et même pour les Cramps (même si c'est quelques dates pour une tournée de Queen qui leur ouvre les portes d'une major).
Le groupe enregistre un premier album en 1980, American Music, en édition limitée et vite épuisée. Dans la foulée ils en enregistrent un second, éponyme, qui regroupe quelques pistes déjà présentes sur American Music. Ce disque recueillera un réel succès critique.
Il faut dire que des pistes comme "Marie Marie", "No Other Girl", "American Music", "Border Radio", "So Long Baby Good Bye" ou "This Is It" sont de pures merveilles tout comme cette reprise de "I Love You So" de Bo Diddley. L'apport du saxo de Lee Allen, figure du early rock and roll fifties de la Nouvelle-Orléans, transcende les compositions du groupe.
Les Blasters faisaient le pont entre le cowpunk et le rockabilly.







Dans la foulée, le groupe tourne en Europe à l'été 82 ce qui leur vaut une réelle popularité au Royaume-Uni même si le groupe regrettera cette tournée qui les empêche de correctement défendre la diffusion de leur disque chez eux...
Trace de cette tournée, un album live "Over There : Live At The Venue".
Si Non Fiction sorti en 1983 contient quelques belles pépites, la réécoute de cet album et surtout du suivant Hard line sorti en 1985 (qui contient quand même "Dark Night" utilisé par Robert rodriguez pour la BO de From Dusk Till Dawn) montre néanmoins un groupe quelque peu essoufflé qui peine à confirmer. Néanmoins ces disques sont très recommandables ! Dave Alvin quitte alors le groupe. Groupe qui continuera à tourner jusqu'à aujourd'hui mené par l'autre Alvin.
Une très belle compilation "The Blasters Collection" est sorti en 1992 retraçant très bien la carrière de cet excellent groupe. En 2002, sort Testament : The Complete Slash Recordings, double cd regroupant comme son nom l'indique toute la discographie du groupe. Néanmoins compter entre 25 et 30 euros tout de même pour cet objet malgré tout indispensable.

Un paquet de disques du groupe sont en écoute sur deezer :
http://www.deezer.com/fr/#music/the-blasters

MOJO NIXON AND SKID ROPER :

Venu de San Diego le duo composé de Mojo Nixon et Skid Roper vaut réellement le détour. Imaginer les Modern Lovers jouant des morceaux empreints de blues, country ou folk ! Et ce pas seulement pour la voix qui présente beaucoup de similitudes avec celles traînantes de Jonathan Richman.
Le duo a pondu la bagatelle de 5 albums entre 1985 et 1989. Si Bo-Day-Shus!!! (1987) plus rockab' contient leur morceau le plus connu, Elvis Is Everywhere, leur meilleur disque reste sans doute le premier, éponyme, sorti donc en 1985. Si Mojo Nixon assumait chant et guitare, Skid Roper était un brillant multi-instrumentiste, avec une préférence pour la washboard.
A noter que les possesseurs de la cassette audio avait droit à l'époque à deux pistes en sus !
Les fans du groupe surnomment ce disque "Free, Drunk and Horny"... et ma foi cela lui va plutôt bien !
Sur une base a priori minimaliste, le groupe fait preuve d'un réel savoir-faire pour dresser un écrin parfait au discours, à la prêche même de Mojo Nixon. Des pistes comme "Mushroom Maniac," "Jesus At McDonalds" ou "Art Fag Shuffle" font la démonstration du talent des deux protagonistes.





L'album en écoute sur deezer :
http://www.deezer.com/fr/#music/mojo-nixon/mojo-skid-156416

Skid Roper en solo sortira deux albums en 1989 et 1991 de bonne tenue dans une veine très country et un album qu'on dit ambitieux, Rock And Roll Part 3 sorti en 2010 et qu'il a mis dix ans à écrire. On n'a pour l'heure rien entendu du disque.
Mojo Nixon après des albums solos et au sein des Toadliquors (!) ou en duo avec Jello Biaffra, il vit désormais plus ou moins s'est retiré du monde de la musique. Il s'est par ailleurs affirmé comme un des partisans du téléchargement déclarant même "I'm not an asshole like Metallica." Et joignant le geste à la parole, il a proposé en 2009 ses albums en téléchargement libre via amazon US.

RANK AND FILE :

Formé par les frères Kinman, Chip et Tony, les Rank And File ont une progression musicale quelque peu curieuse : venu du punk puis de la new wave le groupe évolue progressivement vers une musique plus roots où la country est l'élément central sans pour autant oublier leurs premières amours. D'ailleurs après la fin de l'aventure Rank And File en 1987, les frangins fonderont un groupe électronique, Blackbird !
Mais ce qui nous intéresse ce sont ces trois albums que sont : Sundown (1982), Long Gone Head (1984) et Rank And File (1987). Si les deux derniers contiennent quelques morceaux intéressants, leur fait d'armes reste (comme souvent avec le cowpunk d'ailleurs) leur premier disque, Sundown.
Neuf morceaux, une demi-heure, pas de fioritures.
Il contient ce tube "Amanda Ruth" que reprendront à l'occasion d'un comeback les Everly Brothers suite aux conseils avisés de Dave Edmunds.
Mais le reste de l'album est à l'avenant : "I Went Walking", "Coyote", "The Conductor Wore Black" rien à jeter sur ce disque impeccable qui montre un groupe entre passé (country) et présent (punk rock) mais qui réussit la synthèse parfaite et aura une immense influence sur la fameuse alternative country des années 90's.





THE RAVE-UP :

Ce groupe a eu une histoire quelque peu erratique. A l'origine composé en 1980 de Michael Kaniecki (guitare/chant), George Carter (basse et Rich Slevin (batterie, qui a vite remplacé T.J Junco le batteur originel), les Rave-Ups se fondent une petite réputation de groupe punk/new wave prometteuse à Pittsburgh en Pennsylvanie. Rich Slevin quitte ensuite le groupe, groupe qui déménage pour Los Angeles...où il splitte une première fois...
Finalement le groupe renaît à l'initiative de Podrasky avec le batteur Tim Jimenez, le guitariste Chuck Wada et le bassiste Douglas Leonard. C'est sous ce line-up que le groupe sort un premier EP Class Tramp d'une facture assez classique qui ne présente que peu d'intérêt dans le cadre d'un topic consacré au cowpunk.
Le groupe se stabilise (enfin) autour de Podrasky, Jimenez et le guitariste Terry Wilson et le bassiste Tommy Blatnik. Ce nouveau line-up enregistre un premier album Town And Country en 1985 sur lequel le groupe mèle country, punk rock mais aussi des éléments new-wave hérité des premières amours de Podrasky.
"Positively Lost Me", "By The Way", le bluegrass "Remember (Newman's Lovesong" sont autant de pistes qui vont durablement marqué le courant alternative country des années quatre vingt dix.
"Positively Lost Me" fut un tube (et peu représentatif des influences country du groupe), que l'on retrouve sur le volume 12 des compilations Rhino "Just Can't Get Enough: New Wave Hits of The 80's".
Le groupe signe alors chez Epic signant deux albums de bonne tenue, The Book Of Your Regrets en 1987 et Hamlet Meets John Doe en 1989 même si on ne retrouve pas l'alchimie de Town And Country.
Après un dernier album sorti dans l'indifférence générale, Chance le mal nommé (1990), le groupe splitte en 1992.

La seule vidéo disponible malheureusement :




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suite du topic très bientôt avec la seconde partie consacrée aux seconds couteaux (ce qui ne veut pas dire dispensable !)

Le second volet :
http://rawpowermagazine.blogspot.com/2011/11/coup-de-projo-californian-cowpunk-22.html

2 commentaires:

  1. "A noter que Country Dick Montana avait également monter un projet live avec Mojo Nixon et Dave Alvin (The Blasters) mais pas de trace "audio" à notre connaissance." - tu penses aux Pleasure Barons http://www.allmusic.com/album/live-in-las-vegas-r177633/review ?

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  2. Alors là mon cher Ratel, tu m'en bouches un coin ! Je pensais pas que quelque-chose était sorti. Va falloir que je scrute pour trouver çà. Merci du tuyau.

    Frank

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