21 juin 2009

Blue Mountain Eagle (1970)

Attention chef d'oeuvre ! Et on pèse nos mots... Cet album maudit d'un groupe qui l'est tout autant fait partie de ces grands oubliés des sixties. Car même s'il ne sortira qu'en 1970, ce disque est avant tout un pur produit de la fin des années soixante un joyau du psychédélisme.
Le groupe naît des cendres du Buffalo Springfield sous l'impulsion du batteur canadien du groupe, Dewey Martin. En effet ce dernier souhaite monter les New Buffalo Springfield ce que Stephen Stills lui interdira par voie de justice.
Le groupe est alors composé en plus de Martin, de David Price à la guitare rythmique (qui fit les musiciens de studios pour The Monkees...), Randy Fuller à la basse (du Bobby Fuller Four), et de Bob "BJ" Jones à la lead (qui a joué brièvement avec Little Richard).
Suite à l'interdiction faîte à Dewey Martin de reformer les Buffalo Springfield, on pense le groupe finit. Et pourtant... Le groupe rejoint par Don Poncher à la batterie (un jeune surdoué puisqu'à seize ans il accompagnait déjà Tex Williams...) est vite signé en 1969 sur Atlantic par un Ahmet Ertegun flairant toujours les bons coups et ce malgré les doutes de la maison de disques.
Joey Newman chanteur/guitariste au sein notamment de Don & The Good Times, et d'autres groupes locaux complète le groupe. Son talent d'écriture et son jeu de guitare apportant l'élément qui manquait au groupe pour prendre son envol.
Le groupe ainsi constitué décide de se tester en prenant la route durant six semaines. C'est durant cette période que le groupe peaufine les morceaux qui figureront sur l'album. Lorsque le groupe entre en studio, il décide d'enregistrer ses morceaux "live", ce parti-pris est pour beaucoup dans l'ambiance générale du disque.
Pour parfaire le tableau, les Blue Mountain Eagle enregistrent avec l'ingénieur du son Bill Halverson connu pour ses travaux sur Déjà Vu de Crosby Still Nash & Young la même année ou avec Cream et Grateful dead.
Le résultat est magistral. Tant dans la grande qualité des compositions que dans leur grande variété.
L'album s'ouvre avec "Love Is Here" morceau épique aux formidables harmonies vocales accompagnant la montée en puissance des guitares. Car il convient de signaler que l'ensemble des membres du groupe participe aux parties vocales. Ainsi sur la délicate ballade psychédélique "Yellow's Dream" c'est Don Poncher qui pousse la chansonnette d'une voix monocorde, vite rejoint par un Newman reconnaissant lui même chanter sur ce morceau "d'une voix de fausset". Il en résulte une merveille de morceau pop, baroque et touchant.
"Feel Like A Bandit", aux parties rythmiques présentant d'étranges similitudes avec "Venus" de Schocking Blue, évoque le meilleur de Moby Grape, alors que "Troubles" excellente ritournelle country rock annonce les enregistrements de Grateful Dead ou des New Riders Of The Purple Sage. "Loveless Lives" quant à lui est sans doute le meilleur morceau que Spirit a oublié d'écrire. Le morceau est illuminé par le jeu des trois guitaristes qui s'illustrent tour à tour sans jamais céder à la démonstration.
Faisant le pont entre sixties et seventies, "No Regrets" plein d'emphase annonce à la fois le rock progressif mais également le hard rock pompier à la Uriah Heep ("The Wizard" sur Demons & Wizard). Pour autant, le groupe, ne franchit jamais la limite, évitant toute faute de goût.
"Winding Your String" est l'occasion de se rendre compte du talent de Don Porcher. Son jeu de batterie, souple et précis, porte littéralement le morceau, l'emmenant vers les sommets, arrivant même à faire de l'ombre au jeu de guitare de Joey Newman !
Le bassiste Randy Fuller, apporte sa pierre à l'édifice en signant "Sweet Mama", à la ligne de basse énorme. Ce morceau est la seule concession du groupe à la course au heavy rock qui secoue l'Amérique à cette époque. Don Poncher y fait encore des merveilles à la batterie et aux percussions, réussissant à rendre écoutable un solo de batterie (!). On aurait aimé que Cream sache en faire autant sur l'épouvantable "Toad"...
"Promise Of Love" ballade sirupeuse qui fait écho au "Yellows Dream" du début d'album est le seul morceau dispensable du disque. L'album s'achève sur l'enjoué "Trivial Sum" concluant de belle façon un album incontournable, à ranger aux côtés de Forever Changes de Love, Buffalo Springfield Again et Surrealistic Pillow de Jefferson Airplane.

Malheureusement, l'histoire en a décidé autrement. Malgré une tournée où ils auront ouvert pour Pink Floyd, Hendrix, Love ou Eric Burdon, les ventes de l'album ne dépasseront jamais le stade du confidentiel (quelques centaines de copies !) condamnant le groupe à splitter la même année... après à peine plus d'un an d'existence...

Cette courte carrière et l'échec de ce premier disque a eu pour conséquence de voir cet album ignoré par la presse spécialisée... le rendant quasiment introuvable.

Déniché par hasard dans une médiathèque dans une horrible version cd, il y a maintenant quinze ans, la copie (gravée) de ce disque ne m'a plus jamais quitté. Il était temps de rendre justice à cet album et ce d'autant que le disque est enfin disponible en cd dans une version digne de ce nom, avec en bonus track Marianne de Stephen Stills face B du seul 45T du groupe (Yellow's Dream / Marianne).

En guise de conclusion, ces derniers mots : achetez le !

Mr Rock

PS : vous trouverez quelques pistes et de bonnes infos sur le groupe sur ce site :
http://www.nickwarburton.com/wordpress/?cat=10

Tracklisting :
1. Love Is Here
2. Yellow's Dream
3. Feel Like a Bandit
4. Troubles
5. Loveless Lives
6. No Regrets
7. Winding Your String
8. Sweet Mama
9. Promise of Love
10. Trivial Sum
11. Marianne
12. Marianne

6 commentaires:

  1. Je suis en train d'écouter cet excellent album : excellent, tout y est ! Un "must" pour les amateurs du genre.

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    1. enfin un commentaire sur ce disque ! Voilà qui me fait très plaisir :))
      Blague à part. Super disque tout simplement.

      Frank

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  2. Superbe album que je rangerai plus dans un rayon L.A. Music (Byrds, Buffalo, etc) que proprement Psyche, Heavy, Rock ou soul/Blues : l'album navigue sur le fil ténu de tous ces albums mais ne verse pas totalement dans un Heavy Psyche à la Bloodrock ou Sugarloaf.

    A noter que Joey Newman forma le remarquable Bandit en 1974 pour une sortie d'album du même nom en 1975 : superbe disque de Hard Rock préfigurant le Hard late seventuies : arrangements somptueux d'une précision remarqueble, bel effort, encore une fois d'une musique typiquement L.A.

    Ce disque est à relier aux deux albums hyper cool de Sweathog, groupe suivant de BJ Jones et johnson.
    Bien que moins heavy, on y retrouve le même type de son, quelques années plus tard.

    Blog très cool et merci pour cette bonne chronique qui fait plaisir là où elle passe

    Peace, Bro'n'Sisiters

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    1. Merci ! Effectivement je partage ton avis sur le "style" du groupe. Par contre j'avais pas noté que c'était Joey Newmann dans Bandit !
      Merci de ces précisions.

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  3. Yeah !
    Et pur ceux qui veulent jeter un coup d'oreille :

    dernier single de Sweathog (à rapprocher au style d'un Joe Walsh/james Gang) :

    http://www.youtube.com/watch?v=64ftqWEAJwQ

    Et un petit bandit (single de l'album, jamais réédité en cd, d'après mes infos) :

    http://www.youtube.com/watch?v=J3t9J1yfIa0

    Très très L.A. donc :-)

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  4. Intéressant en effet, la première plage sort nettement du lot et la face B est supérieure à la A à mon sens

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